Conditions matérielles d'accueil : la CEDH refuse de condamner la France

25.05.2018

Droit public

Pour la Cour européenne des droits de l'homme, dès lors qu'un demandeur d'asile bénéficie d'un hébergement de nuit financé par l'État et d'une aide apportée par des associations, il n'y a pas de violation de l'article 3 de la Convention au regard des conditions d'accueil.

Dans un arrêt du 24 mai 2018, la Cour européenne des droits de l’homme rejette, à l’unanimité, un recours dirigé contre la France au soutien duquel une demandeuse d’asile alléguait notamment un traitement inhumain et dégradant résultant de la carence de l’État dans son obligation de lui assurer, ainsi qu'à ses trois enfants en bas âge, des conditions matérielles d’accueil décentes au cours de l’instruction de sa demande de protection internationale.
 
Pour la Cour, les requérants n’étaient pas dans une situation de dénuement matériel susceptible d’atteindre la gravité nécessaire pour relever de l’article 3 de la Convention.
Remarque : cet arrêt n’est pas définitif et est encore susceptible d’être porté devant la grande chambre.
Absence de comparaison possible avec les situations déjà condamnées
Pour rejeter la requête des intéressés, la Cour souligne d’abord que les conditions dans lesquelles les requérants avaient été pris en charge n’étaient nullement assimilables à celles ayant donné lieu à des condamnations antérieures.
 
La Cour rappelle, de ce fait, que les violations alléguées sont appréhendées au regard de l’ensemble des circonstances, de droit et de fait, telles qu’elles existaient au moment des faits.
Remarque : le requérant s’appuyait en effet sur des précédents, citant notamment les affaires Rahimi c/ Grèce, (CEDH, 5 avr. 2011, aff. n° 8687/08) et M.S.S c/ Belgique et Grèce (CEDH, 21 janv. 2011, aff. n° 30696/09).
Bénéfice d’une prise en charge dans une structure financée par l’État
La Cour observe ensuite que les requérants ont bénéficié d’une prise en charge dans une structure d’hébergement financée par des fonds publics et assurant un abri pour la nuit et le repas du soir.
Scolarisation des enfants, aide d’associations et suivi médical financé par les autorités
Et si la requérante soutenait que, durant plus de trois mois, ses trois enfants en bas âge n’avaient bénéficié que d’un seul repas chaud, servi le soir dans un foyer géré par une association de droit privé qui, se substituant à la carence de l’action publique, les hébergeait pour la nuit et leur fournissait un petit-déjeuner, la Cour relève que ces enfants étaient scolarisés, déjeunaient à la cantine et bénéficiaient des activités extra‑scolaires organisées par la commune.
 
La Cour note également que les requérants ont perçu l’aide d’autres organisations non‑gouvernementales comme les Restaurants du cœur et la Croix‑Rouge et ne contestaient pas avoir bénéficié d’un suivi médical, financé par les autorités publiques.
Absence d’indifférence des autorités et perspective de voir la situation s’améliorer
Les juges relèvent par ailleurs que « les autorités françaises » ne sont pas restées indifférentes à la situation des demandeurs puisqu’elles leur ont assuré, par divers moyens, la possibilité de « se nourrir, se laver et se loger ».
 
Ils considèrent enfin que « les requérants n’étaient pas dénués de perspective de voir leur situation s’améliorer. En effet, la première requérante avait été convoquée par la préfecture [...] afin qu’il soit statué sur son admission au séjour et qu’elle dépose son dossier de demande d’asile ».
 
Dans ces conditions, pour la Cour, les requérants « n’étaient pas dans une situation de dénuement matériel susceptible d’atteindre la gravité nécessaire pour tomber sous le coup de l’article 3 de la Convention ».

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Christophe Pouly, avocat
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