La réforme des contentieux sociaux dans les starting-blocks

12.11.2018

Droit public

A compter du 1er janvier 2019, les juridictions de la sécurité sociale et de l'aide sociale (TASS, TCI, CDAS...) seront supprimées. Un décret du 29 octobre organise, au niveau réglementaire, le transfert du contentieux en relevant à des juridictions judiciaires spécialement désignées ou au juge administratif. Il précise en outre les nouvelles règles procédurales applicables.

Un décret du 29 octobre pose la dernière pierre à l’édifice de la réforme de l’organisation juridictionnelle du traitement des contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale, applicable à compter du 1er janvier 2019. Celle-ci est portée par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et l'ordonnance n° 2018-358 du 16 mai 2018. Tour d’horizon des principales précisions apportées par le décret.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Remarque : selon les cas, les nouvelles dispositions s’appliqueront soit à partir du 1er janvier 2019, soit aux décisions prises à compter de cette date par les autorités administratives, les organismes de sécurité sociale et les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH).
Nouvelle organisation juridictionnelle

A compter du 1er janvier 2019, seront donc supprimées les juridictions de la sécurité sociale et de l’aide sociale, à savoir : les tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), les tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI), ainsi que les commissions départementales et centrale d'aide sociale (CDAS et CCAS). La Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (CNITAAT) sera, pour sa part, maintenue jusqu'au 31 décembre 2022 au plus tard. Le contentieux relevant actuellement de ces juridictions sera transféré :

  • soit à des tribunaux de grande instance (TGI) et cours d’appel spécialement désignés dont la liste, le siège et le ressort a été fixé par le décret n° 2018-772 du 4 septembre 2018 ;
  • soit - pour une partie du contentieux des CDAS et CCAS - aux tribunaux administratifs et cours administratives d’appel.

Un tableau figurant en pièce jointe ci-dessous présente les juridictions compétentes selon les contentieux, suite à la suppression des instances spécialisées.

Notons que le décret donne compétence au tribunal administratif de Paris pour régler, à l'avenir, les contestations relatives à la détermination de l’autorité administrative compétente en matière d’admission à l’aide sociale, ainsi que pour le contentieux du domicile de secours (litiges relevant actuellement de la CCAS) (CASF, art. L 122-4 et R. 131-8).

Remarque : le texte organise également le transfert des procédures en cours devant les juridictions supprimées au 1er janvier 2019.
Recours préalable obligatoire
La loi du 18 novembre 2016 a rendu obligatoire pour l’ensemble – ou presque – du contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale, le recours préalable au recours contentieux. Deux formes sont prévues :
  • pour le contentieux général de la sécurité sociale et le contentieux de l’admission à l’aide sociale : recours administratif préalable obligatoire (RAPO) soumis à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole  (CSS, art. R. 142-1 et s.). Les litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale actuellement portés devant le TASS doivent déjà être précédés d’un tel recours. Le décret en modifie les règles à la marge ;
  • pour le contentieux technique de la sécurité sociale : recours préalable. Pour ce qui concerne le secteur social et médico-social, précisons que ce recours préalable sera formé soit devant la maison départementale des personnes handicapées s’agissant des contestations des décisions de la CDAPH (CSS, art. R. 142-9 ; CASF, art. R. 241-35 et s.), soit auprès du président du conseil départemental (PCD) pour ses décisions relatives aux mentions « invalidité » et « priorité » de la carte mobilité inclusion (CSS, art. R. 142-9 ; CASF, art. R. 241-17-1). Le décret pose le cadre de ce nouveau recours obligatoire (contenu de la lettre de saisine, modalités d’examen du recours…).
Opposabilité des délais de recours
Par ailleurs, le décret pose le principe général suivant : les délais de recours préalable et contentieux, fixés à 2 mois à compter de la notification de la décision contestée sauf précision contraire, sont opposables sous réserve d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l’accusé de réception de la demande (CSS, art. R. 142-1-A, III nouv.).
Remarque : le décret vient préciser que la notification de la décision de la CDAPH devra préciser, en outre, l’obligation d’exercice d’un recours préalable, ainsi que l’autorité devant laquelle il devra être formé (CASF, art. R. 241-32, dern. al.).
Règles procédurales
Ainsi que le précise la fiche d’impact générale du décret, celui-ci « couvre les différentes étapes d’une procédure contentieuse judiciaire, de la décision initiale de l’organisme de sécurité sociale, de la maison départementale des personnes handicapées ou de l’autorité publique compétente pour l’attribution de prestations d’aide sociale, jusqu’à la Cour de cassation ».
Il présente ainsi les règles procédurales applicables devant les TGI spécialement désignés  (compétence territoriale, modalités de saisine du tribunal, composition du dossier, convocation des parties, mesures d’instruction…) (CSS, art. R. 142-10). La procédure est orale, les parties ayant toutefois la possibilité de présenter leurs prétentions et moyens par écrit sans se présenter à l’audience, des dispositions particulières s’appliquant alors (CSS, art. R. 142-10-4). En appel, les parties n’ont pas l’obligation de se faire représenter. En revanche, les pourvois en cassation doivent être formés par ministère d’un avocat au Conseil d’État ou à la Cour de cassation (CSS, art. R. 142-15).

Les règles procédurales applicables devant les juridictions administratives sont inchangées, le décret précisant juste les règles de prise en charge des frais d’expertise lorsque celle-ci est demandée (C. just. adm., art. R. 772-5 et s.)

Virginie Fleury, Dictionnaire Permanent Action sociale
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